De la mer noire à Iznik
Vous nous avez quittées à Persembe, côte de la mer noire ? Nous sommes aujourd'hui à Iznik, au bord de l'Iznik Gölu (gölü=lac), pas très loin au sud est d'Istanbul! Du trajet a été fait ... Que les amateurs de circuit, ceux qui suivent du doigt nos déambulations sur une carte routière (j'ai principalement nommé nos mères, ah! ah!) se repèrent : après Persembe, Unye. C'est à cet endroit que nous quittons la côte, bien sûr décevante. Pourquoi bien sûr? Mais parce que les guides le disent tous et que nous … pas si malines que ça, on passe outre!
La côte de la mer noire (au nord du pays en tout cas) c'est : dans l'ordre, 1- la mer, 2- une bande très étroite de rochers, de fausses plages où quelques bateaux arrivent à s'accrocher à des digues artificielles, 3- une 2 fois 2 voies -voitures, camions, bus, cars, 4- une succession de petites villes sans intérêt particulier et 5- la montagne. Pas du tout ce à quoi s'attendait Dominique qui a bien vite rangé ses rêves de petits ports, de pêche à la ligne et de farniente au bord de l'eau … Impossible de s'attarder dans le coin.
Je ne vous cacherai pas que nous avons subi une période de perturbations internes depuis à peu près Diharbakir... A cet endroit du voyage nous avons abandonné l'idée de nous enfoncer plus à l'est vers le lac Van puis le mont Ararat, comme c'était plus ou moins prévu.
Et pourquoi donc?
Les raisons de l'une ne sont pas exactement celles de l'autre mais pour ne pas faire de ces questionnements intérieurs le sujet principal de ce post, je dirai juste que nous ne voyageons pas ici avec autant de « détente » que dans d'autres pays. Dominique se sentant profondément « fille du nord » a un peu de mal avec les cultures du sud et notamment les contacts avec la population. Et moi, « fille de la campagne », j'ai un peu du mal avec le rythme que nous soutenons, le bruit des moteurs -le nôtre ou celui des autres, les parkings de ville où nous dormons.
Voyager comme nous le faisons nécessite de l'adaptation (et la permet : pas de réservation, de billet de retour etc), nous nous sommes donc adaptées et avons décidé après moultes discussions d'accélérer notre progression.
Je tiens à préciser que La Turquie elle-même n'est pas responsable de notre petit changement de programme! C'est un pays magnifique (grande diversité de paysages), qui offre une richesse historique et géographique permettant beaucoup de visites, on s'y sent tout à fait en sécurité et ses habitants sont accueillants et chaleureux. Apparté : avant le départ nous nous demandions comment nous allions être perçues puisque nous voyageons sans hommes dans une société où la place de la femme n'est pas celle de nos pays. Cela n'a posé aucun problème, vraiment aucun.
Non, ce n'est pas le pays lui-même qui fait que nous modifions nos plans mais plutôt nos états intérieurs...
Quittant donc la triste côte nord de la mer noire nous piquons vers l'intérieur du pays direction Amasya, (ville sans rien de très particulier à signaler sinon une ou deux rues de maisons ottomanes rénovées, on en verra de plus belles dans d'autres villes.)
Après Amasya, Kastamonu où nous dormons en haut de la ville sur le parking de l'hopital, puis Safranbolu.
Ah! Là nous avons trouvé notre petit paradis... Un endroit où nous reposer de nos ressentis, où trouver un deuxième souffle, un endroit où personne ne s'interroge sur notre présence, où j'entends chanter les oiseaux et peux regarder le soleil jouer dans l'herbe.
Pas à Safranbolu même mais à côté : Yörük Köyü, un paragraphe dans le Lonely et une pancarte marron fichée au bord de la nationale (les panneaux signalétiques sur fond marron indiquent les sites, les curiosités).
L'otopark où nous nous garons est prometteur : sur ce grand parking sablonneux encadré de verdure, nous sommes seules. L'air sent le printemps, le silence n'est troublé que par le chant des oiseaux et pour une fois le ciel bleu semble vouloir tenir jusqu'au soir ...
Merveilleuse visite du hameau où la grande majorité des maisons date de l'époque ottomane. La plupart sont abandonnées bien sûr et souvent en mauvais état de conservation, mais il règne un calme splendide dans ces petites ruelles du passé où nous chuchotons comme dans une salle d'attente. Le village est encore habité et Filiz nous fait une visite épique de sa maison, une de celles qui, restaurées ont été converties en musée. Peu importe que nous ne pigions pas un mot de turc, Filiz possède un langage des gestes coloré et nous décrit chaque chose sur fond de rires et de complicité. Après la visite elle nous sert des gözelme au fromage (crêpes fourrées) et du çay : Filiz tient aussi un petit restaurant dans sa cour.
Nous passons à Yörük Köyü deux nuits successives, ce qui est très rare pour nous!
Bien sûr nous en profitons pour visiter Safranbolu qui n'est qu'à quelques kilomètres et dont la réputation est principalement bâtie sur son quartier ancien de maisons ottomanes ainsi que sur sa production de safran. Nous visitons mon premier mais n'achetons pas mon second!
Après Safranbolu, un peu de route jusqu'à l'Abant Gölu où nous passons une nuit calme dans un camping (dont le portail grand ouvert nous permet d'entrer mais qui attend visiblement l'été pour être en service). Vue sur le lac après une belle après-midi en pleine nature -où Dominique nettoie le camion à fond tandis que je fais une aquarelle.
Je dis nuit calme car la précédente l'avait moins été!
Essayant pour une fois d'éviter un stationnement en ville, nous avions jeté notre dévolu sur un agréable bord de route un peu en retrait. Arbres printaniers, prairie, derniers chants d'oiseaux, bref. Fin de journée tranquille puis dodo. Mais vers minuit ... coups de klaxon juste derrière nous! Dominique saute en l'air, je préconise d'attendre sans bouger. Re-klaxon, plusieurs fois. Je défais discrètement un des volets de l'arrière et jette un oeil : la Jendarma, gyrophare en fonction attend que nous nous manifestions!
Après un contrôle routinier des passeports on essaye de négocier pour rester là mais las …. non, non, ce n'est pas possible. Bon rien de bien grave mais fini le beau coup d'œil sur la campagne. La mort dans l'âme, on ramasse ce qui traîne, contact, phares et direction la ville.
C'est comme ça … pour la deuxième fois que nous nous faisons contrôler de nuit par la Jendarma (la première fois il était 3h du matin et nous avions pu rester sur le site) … le camping sauvage ici, faut oublier!
Après l'Abant Gölü, quelques heures de route nous ont menées ici donc, à Iznik. Le parking du port, en limite de ville, beau. Beau mais chaud ouh là!(28° dans le camion toute la nuit!), animé (derniers bruits de voitures et de conversations vers 2 h du matin et premiers à 5h!) …
Au programme de la journée : connexion internet, visite de la ville et gonfler nos batteries humaines avant d'aborder Istanbul, la trépidante et grande Istanbul!
S, Iznik, 16 mai.
Bon appétit avec la dernière photo!