en chemin vers la Cappadoce
Nous franchissons la chaîne de montagne du Sultan Daglari par une route vertigineuse qui, sur 35 km seulement, nous fait grimper à 2000 mètres d'altitude pour redescendre vers la ville d'Aksehir. La neige recouvre les sommets et n'a pas encore fondu autour du point d'eau près duquel nous nous arrêtons au col pour laisser le camion récupérer, (nous aussi) et faire le plein de cette eau de source bien fraîche.
Là commence la traversée d'un immense plateau d'altitude (1000 mètres) entre Aksehir et Cihanbeyli. Un autre visage de la Turquie s'offre à nous : étendues sans fin, quelques rares villages aux maisons de terre crue, cubiques, basses (pour se protéger du vent), aux toits de branchages recouverts de terre et d'herbe. D'immenses zones labourées qui attendent des semences, de la steppe parcourue par des troupeaux de moutons ou de vaches guidés par des hommes ou des enfants à cheval.. Le regard se perd dans le lointain sans obstacle. La route est droite, on la croit sans fin, très peu de circulation Nous roulons, roulons jusqu'à Cihanbeyli.
Cihanbeyli, une de ces petites villes turques qui ont poussé comme des champignons, aux infrastructures qui semblent surdimensionnées : routes à deux fois deux voies avec terre-plein central à l'entrée dans la ville, avenues toute aussi larges, immenses places alors que la circulation est quasi nulle – un développement à venir, certainement attendu- immeubles neufs partout qui ont étouffé quelques anciennes maisons de village en briques de terre encore debout au milieu des immeubles.
Un petit tour dans la ville et nous décidons de nous garer pour la nuit sur une place bordée de quelques commerces, sur laquelle jouent des enfants.
Aussitôt une jeune femme vient nous voir et nous invite dans sa boutique de vêtements à boire un çay, très excitée à l'idée de converser avec des touristes (il faut dire que Cihanbeyli n'est pas vraiment une halte touristique !). Elle ne sait ni notre fatigue de la journée, ni les kilomètres parcourus, ni les sollicitations, ni les émotions ressenties. Bien sûr, nous allons boire le çay! Les enfants sont là qui exercent et testent sur nous les mots d'anglais appris à l'école et nous aident bien à communiquer avec les adultes qui sont maintenant nombreux autour de nous : la voisine, les hommes du voisinage. On prend des photos, avec les enfants, avec nous, les femmes entre elles etc... On relève l'adresse mail pour les envoyer.
On discute, on refuse poliment le gîte et le couvert et on retourne au camion. On ferme les volets pour s'isoler des regards des enfants qui tourne encore, curieux, autour du camion et on souffle... dans l'odeur âcre de la fumée des chaudières à charbon des immeubles environnants.
Nous longeons le Tuz Gölü, le lac salé, avant de pénétrer en Cappadoce par Aksaray au sud ouest.
D.
Güzelyurt le 16 avril
Une heure de solitude …
Ce matin sur la place de Güzelyurt.
Dominique est restée au camion pour écrire son journal de bord, faire quelques rangements, rester au calme... La vie en camion n'est pas aussi tranquille que vous l'imaginez peut-être! Il y a toujours une chose ou l'autre à faire !
Ce matin, relâââche!
Sac au dos je quitte le superbe parking où nous avons dormi bien à plat et me glisse sur la place où sont regroupés tous les cafés. Il est encore tôt, la lumière a cette douceur des débuts de journée, l'air est encore tout juste frais comme il faut. Je m'installe à une table en bois, commande un çay et lève le nez, laisse mon regard parcourir cette place peuplée, comme un peu partout, d'hommes.
Les femmes, on sait bien où elles sont : à la maison.
Ca fait toujours un peu bizarre ces assemblées d'hommes ...
Ils sont là, tranquilles, attablés à boire des çay pendant des heures, à jouer (au backgammon?) en discutant d'on ne sait quoi … Ne croyez pas que je vous prépare un discours féministe, mais quand même ...
Ce matin j'y suis dans l'assemblée, mais un peu à l'écart. Restons discrète …
Pendant environ une heure je profite du temps, de l'air, du petit soleil matinal.
Je dessine un peu, lézarde, moi aussi …
S.
Güzelyurt, 17 avril, dans le cyber, sur fond de chansons turques, entourée de jeunes rivés à leurs écrans de jeux.